Par Rachel Barrett-Trangmar
Angelina Lédée possède de nombreux talents musicaux, notamment le violon qu’elle pratique depuis presque toujours. C’est un don de son héritage qu’elle partage désormais avec les autres sur l’île de Saint-Barthélemy.
Qu’est-ce qui vous a inspiré à jouer du violon ?
J’ai baigné dans la musique dès ma naissance. Mon père, Raymond Lédée, joue de la guitare et se produit fréquemment avec des groupes locaux sur l’île. Quant à ma grand-mère paternelle, elle jouait de l’harmonica et du tambourin. J’ai aussi de bons souvenirs de regarder mes parents danser ensemble. Il était donc naturel que je commence à danser, en pliant les genoux au rythme de la musique caribéenne française locale, peu de temps après avoir appris à me tenir debout. Dans ce contexte, il n’était pas surprenant que mes parents me demandent si je voulais apprendre un instrument. Sans hésitation, j’ai dit “Oui” et j’ai instinctivement choisi le violon.
Quelle formation avez-vous suivie ?
À seulement quatre ans et demi, j’ai rejoint l’école de musique de Saint-Barth, où j’ai joué du violon pour la toute première fois. L’école de musique utilise la méthode Suzuki pour enseigner le violon, qui est similaire à la façon dont un enfant apprend à parler sa langue maternelle – sans aucune théorie. La méthode Suzuki repose sur l’écoute, l’imitation et la sensibilité à la musique. Ainsi, sans lire une seule partition, je pouvais jouer des mélodies simplement en les écoutant, ce qui a contribué au développement progressif de mon oreille musicale. En outre, après avoir quitté l’école de musique de Saint-Barth, j’ai appris à improviser en jouant de la musique latine et jazz.
L’île n’ayant pas de lycée, j’ai dû partir à l’âge de treize ans pour aller vivre à Montpellier. Pour mon baccalauréat, j’ai choisi d’étudier la littérature, avec une spécialisation en musique incluant la théorie et l’histoire. En même temps, j’ai étudié à temps partiel à l’école de musique Le JAM où j’ai joué différents styles de musique en groupe.
Ensuite, j’ai poursuivi mes études à l’Université de Lyon où j’ai suivi un cursus de trois ans en Musicologie, acquérant de l’expérience dans plusieurs domaines : théorie musicale, direction de chœur, composition orchestrale, chant et composition de chansons.
Enfin, en juillet 2023, après six ans d’absence, je suis retournée sur l’île en tant que violoniste professionnelle.
Où vous produisez-vous et qui sont vos clients ?
Mon nom de scène est simplement ‘Ti Lina’ et je joue du violon pour les locaux et les visiteurs. Je me produis en solo ou en duo, ou j’accompagne différents groupes de musiciens. Je peux facilement m’adapter aux préférences musicales de mes clients, notamment pour les événements clés du calendrier de l’île, ainsi que pour les cérémonies à la Collectivité et les services de mariage dans les églises ou sur les plages de l’île. Je joue également dans des restaurants, des hôtels, des villas et des yachts. Ce que je trouve le plus gratifiant, c’est de voir les gens sourire ou danser, ce qui est un signe de leur appréciation et crée une ambiance joyeuse.
Quel type de musique aimez-vous jouer ?
Je joue souvent avec une bande sonore d’autres instruments de musique tout en jouant la mélodie au violon. En ce qui concerne mon répertoire, je n’ai pas vraiment de genre spécifique car je joue différentes mélodies tout le temps. Chaque liste de chansons est sur mesure pour chaque client. Néanmoins, j’avoue avoir des préférences pour les styles liés à mes origines caribéennes et espagnoles (père et mère respectivement), tels que le dancehall, le zouk, le kompa, le flamenco, le reggaeton, la salsa et la bachata.
Composez-vous votre propre musique ?
Oui, j’adore composer tous types de musique, et j’utilise fréquemment mon ordinateur pour produire ce qu’on appelle la composition assistée par ordinateur. À l’université, j’ai fait le design sonore pour plusieurs courts métrages, et j’ai également composé toute une bande sonore musicale pour un film – ce qui a été une expérience formidable.
Avez-vous des ambitions que vous aimeriez réaliser ?
J’aimerais encourager les jeunes de l’île qui sont désireux de produire leur propre musique, que ce soit dans un studio d’enregistrement ou en apprenant un instrument pour jouer dans un groupe. De plus, j’aimerais continuer à composer et à évoluer dans le domaine de la musique de la meilleure façon possible. Mon objectif ultime serait que Saint-Barthélemy ait sa propre identité musicale, similaire à nos voisins de Saint-Martin, de la Guadeloupe et de la Martinique.
Quel message aimeriez-vous partager avec les habitants de Saint-Barthélemy ?
Saint-Barth, c’est chez moi, là où j’ai grandi. J’apprécie l’authenticité de notre culture, que de nombreuses personnes s’efforcent de protéger. Cette île est un trésor qui doit être traité avec soin. La musique live locale fait partie de ce précieux trésor, elle nécessite donc également notre soutien pour la préserver pour de nombreuses années à venir.