Quel est votre parcours et votre lien à St Barth ?
J’ai grandi sur l’île et ai poursuivi mes études de marketing et commerce en métropole. Apres mon master en développement durable, c’est tout naturellement que je suis rentrée à la maison, en 2010.
Il n’y a rien de très cohérant dans mon parcours professionnel lorsque j’énumère mes diplômes et les postes qui ont jalonnés ces dernières années, dans des domaines très éclectiques, de la location de voiture, au centre nautique, au fret maritime, ou à l’immobilier… J’aimais déjà prendre des photos à l’adolescence sans me dire que cela pouvait devenir un métier, et je peignais régulièrement sur toile et bois régulièrement parce que j’avais toujours vu ma mère peindre.
Comment avez-vous été amenée à faire de la photo ? et depuis quand ?
Alors que je travaillais dans une agence immobilière, j’ai eu la possibilité de cumuler mon poste de responsable administratif et financier ainsi que la prise de vue des villas. Je me suis formée à Paris auprès de Guillaume Mussau, alors que j’étais en vacances en Métropole. Sans relâche, j’ai continué à étudier, à m’exercer, à chercher à me perfectionner et à créer mon style. Je décide finalement de me mettre à mon compte après un rythme effréné de reportages photos d’environ 2 villas par semaine pour l’agence pendant 2 ans… en plus de mes responsabilités inhérentes à mon poste.
Avec le temps, j’ai élargi mon offre et propose aujourd’hui de la photo immobilière pour les villas, hôtels, commerces, architectes, décorateurs mais également des photos plus style de vie pour la communication des professionnels tel que de la photo culinaire, d’art de la table, d’ambiance ou de produits… ainsi que des portraits pour mes clients.
Que représente la photographie pour vous ?
Difficile de répondre à cette question…
La photographie est mon métier, mais j’ai aussi de nombreux centres d’intérêts que j’ai mis de côté ces dernières années pour me concentrer sur la photo.
La photo est vraiment un domaine très technique, très précis, très pointu. On ne s’imagine pas tout ce qu’il faut maitriser… En tous les cas c’est ma réalité, car je n’ai pas grandi avec un appareil dans les mains ni dans cet environnement. Déjà, il faut connaitre son appareil, savoir ses limites et anticiper son comportement dans tel ou tel situation.
Ensuite il faut maitriser l’aspect logiciel, pour le développement numérique et la retouche ; l’entretien du matériel photo et informatique ; le cadrage, la composition, pendant la prise de vue. Et cela se complexifie lorsqu’on utilise de la lumière artificielle type flash. Il n’y a pas le temps de s’ennuyer quand on apprend un peu sur le tas sans être passé par une école de photographie. Et tout celà demande un gros investissement financier, tant pour l’achat de matériel, toujours plus perfectionné que pour la formation.
C’est très subjectif comme tous les métiers artistiques et il m’a fallu apprendre à affirmer mes idées, moins craindre le jugement…Ce qui importe n’est pas ce que cela représente mais ce que cela m’a apporté. J’avoue avoir souvent eu envie d’abandonner, tant je suis intransigeante et perfectionniste, au point de me faire douter de tout. J’ai les qualités de mes défauts. Je vois aussi mon choix professionnel comme l’occasion de dépasser mes peurs, doutes et blocages pour, à mon niveau et en toute humilité, me transcender.
J’aime vraiment l’aspect challengeant de mon travail car mes clients -principalement des professionnels- ont un besoin marketing : Ils ont besoin de vendre avec l’image : Mes photos doivent refléter leur intention, l’état d’esprit, traduire leur ADN. Il s’agit de branding au-delà d’une identité visuelle tel que le logo, le code couleur…
Un propriétaire de villa est aussi un professionnel, son but est de louer son bien. Prenons la situation dans l’autre sens, vous partez en vacances vous voulez louer une maison, vous connaissez la destination. Les photos des biens disponibles sont la première chose que vous allez regarder pour vous permettre de faire votre choix. Certaines images vont plus vous attirer que d’autres. Ensuite seulement, vous considérerez les caractéristiques fonctionnelles du bien. L’accroche passe d’abord par l’image…
Aujourd’hui je vois des villas avec du potentiel mais avec des images médiocres ou avec un potentiel mais clairement peu d’efforts sont portés à la décoration.
Comment caractérisez-vous votre travail ?
Mon slogan est « créatrice d’images à votre image ». Mon métier est, la plupart du temps, de m’intégrer au projet du client, d’une équipe, d’une marque le temps d’un shooting et de créer les supports visuels dont ils ont besoin. Je m’assure en amont qu’ils connaissent mon travail et mon univers car mes images ont un look assez distinctif.
Chacun a ses propres références pour décrire une image agréable à regarder et ce sont rarement des images dures, sombres ou fade, (même si j’ai déjà eu une cliente pour qui c’était le cas à ma plus grande surprise).
Dans une certaine mesure, je peux modifier mon style pour coller au projet, mais il m’est arrivé deux fois de ne pas signer les photos tellement le client voulait quelque chose à l’opposé de ma vision de l’harmonie. Plusieurs spécificités, notamment relatives aux couleurs, sont importantes à rappeler. Par exemple, chaque écran a des paramétrages sortis d’usine différents. Si vous affichez la même image sur différents supports, vous n’aurez pas les mêmes couleurs. La fidélité des couleurs est vraiment très importante. Je veux vraiment être certaine que le rendu de mes photos sera le même sur des écrans professionnels ou calibrés. Je me suis donc formée en gestion des couleurs et je me suis équipée d’un deuxième écran avec une sonde de calibration intégrée qui m’assure une gestion des couleurs et de la luminosité fidèle. C’est la maitrise de l’image de A à Z. Je n’ai pas la prétention d’être chromiste ou retoucheuse professionnelle mais je suis très attentive à ce que l’image que je créée soit fidèlement la même pour les autres sur du matériel paramétré.
Que souhaitez-vous transmettre ? comment décrivez-vous votre univers ?
Des couleurs douces et chaleureuses, des images lumineuses. Pour des clients qui souhaitent une finition haut de gamme, je nettoie l’image avec Photoshop pour obtenir une lecture de l’image sans défaut. Typiquement il m’arrive d’effacer les plis d’un lit, d’enlever le reflet dans la TV, effacer un câble de lampe, enlever des feuilles sur le sol … C’est important que la lecture de l’image se fasse sans accros, qu’il se dégage une impression d’harmonie, de clarté, juste que l’expérience soit agréable au premier coup d’œil. Il m’arrive souvent de bouger les meubles pour le cadrage, afin que ce que je vis pendant le shooting, ce que je vois, se ressente en image. Je souhaite figer la réalité vue avec notre superbe œil humain hyper perfectionné et nous sommes soumis à des contraintes et des compromis avec un appareil photo, qui n’existent pas lorsque nous sommes sur place.
Quels sont vos projets ? ou aspirations d’évolution ?
Je parlerais plutôt d’envies que de projets – cela me met moins la pression.
J’aime vraiment ce que je fais actuellement et cela me ferait plaisir de travailler dans d’autres destinations, de temps en temps… Choisir les projets coup de cœur, c’est le grand luxe…
J’ai des séries photos et peintures personnelles qui prennent forme, et que je ne pourrai pas cacher indéfiniment. C’est tellement intimidant que j’ai longtemps hésité à utiliser un pseudo.
J’ai recommencé à peindre l’an dernier, après 10 ans d’abandon. J’avais un réel besoin de toucher la matière de faire avec du concret et d’être un peu moins sur l’ordinateur.
Quand je crée sur toile, je lâche prise, j’ai le sentiment de me respecter, c’est assez profond mais c’est très juste. Et je vois le résultat de mes décisions instantanément sans retours en arrière possible, ce qui n’est pas le cas en photos où l’on peut retravailler une photo à l’infini… C’est grisant, jusqu’à l’instant où l’on se demande si on a tout gâché ou pas…
Je ne me force pas à créer, il y a des moments où je n’ai rien à exprimer et d’autre périodes où je vais à l’atelier tous les jours et produis à la chaine presque, j’y passe tout mon temps libre.
Je peins principalement sur des grands formats 130 cm*97 cm et utilise de la matière, que je réalise sur place avec mon batteur et ma balance pour obtenir ces textures et certains rendus au séchage. C’est le fruit de recherche, de hasard mais surtout de lâcher prise sur le résultat. Quand j’y mets trop de sérieux, je me rappelle que je suis là pour expérimenter et faire sans pression de résultat. Selon les séries, après plusieurs jours de séchage je viens ensuite retravailler, j’ajoute de la couleur, ponce, remet de la matière, il m’arrive souvent d’avoir 4 toiles en cours avec un roulement séchage, création afin de pourvoir créer sans interruption tant que le flux est là.
Parallèlement à cela, j’ai des séries photos en cours, que je prends le temps de faire murir. J’aime mon travail de production photo pour des clients mais j’ai aussi besoin de m’exprimer à ma façon. Ce qui est considéré comme un mauvais paramétrage est pour moi l’occasion de créer. C’est ainsi qu’est née la série Capture Light avec Claire de Lune de Debussy qui tournaient en boucle dans mon esprit. Il en ressort des œuvres abstraites semblable à des peintures sur toile. Ces photos sont disponibles en tirage d’art en série limitées de 15 exemplaires sur papier Baryté au format d’environ 100cm par 61 cm et un nombre limité à 5 exemplaires sur plexi…